samedi 28 mars 2009

184- Un beau ténébreux - Julien Gracq


Un beau ténébreux
Julien Gracq
Ed. José Conti, 1992
(Librairie José conti 1945)

Hommage à Julien Gracq. "Un beau ténébreux", à ne pas lire trop vite, pour s'imprégner des riches descriptions et d'une ambiance particulière. Pourtant la Bretagne est belle, paysage de vacances, L'Hôtel des Vagues, lieu de rencontres, la plage de Kérantec...
Une ombre passe sur ces mois d'été et des relations peu sereines s'installent entre quelques jeunes gens. Etonnant cet Allan, aussi au jeu d'échecs : "Il est certainement un solutionniste de première force, en peu de temps il eut découvert la case critique... " Dans ces paragraphes aux alentours de la page 77, l'auteur montre qu'il était lui-même joueur d'échecs, laissant un souvenir sans doute, entre autres, au club breton de Quimper. Il annonce le thème indien, "un Hozhausen particulièrement épineux", la Sicilienne, l'Ouest-Indienne. "On peut ressentir, il me semble, le monde comme ce carré d'hiéroglyphes d'un problème d'échecs où un mécanisme secret est enseveli...", "une clé d'or sur laquelle il suffirait de poser le doigt pour que tout à coup tout change..."
Allan toujours, cette fois en les pages 124..., au casino, autre jeu, où il jette les jetons sur le tapis "avec des sautes, des voltes incompréhensibles (...) à la solution de quelque obscur problème algébrique (je pensai au problème du cavalier au jeu d'échecs...), des pertes d'argent énormes à en gêner ses amis, les autres joueurs, le croupier lui-même, comme un message sans doute "il forçait chacun à lire dans son jeu."
http://www.jose-corti.fr/titresfrancais/un-beau-tenebreux.html
http://fr.wikipedia.org/wiki/Julien_Gracq

183- La blancheur du Lys - Giboudeau



La Blancheur du Lys
Christian Giboudeau
Editions du Bastberg - Les Polars régionaux, 2003
Quatrième de couverture : "Les eaux du Doubs charrient toutes sortes de débris et parfois même des cadavres. Besançon vit des heures difficiles en cette fin d'hiver. Quand les échecs deviennent plus qu'un simple jeu et qu'un damné décide de franchir la ligne blanche afin de les jouer "pour le sang", il faut plus qu'une puissance policière traditionnelle pour déchiffrer une stratégie minutieusement réfléchie. Georges Clément, Grand Maître des Echecs, troublé sur la fin de sa vie par le génie d'un démon, croisera le chemin ténébreux de deux hommes, l'un policier, l'autre assassin, soudainement liés par une partie sans hasard et sans merci..."
Le jeu d'échecs est donc moteur dans ce thriller bien construit. Une entrée au club d'Echecs de Besançon, au trente-trois rue Bersot. Des femmes assassinées et un curieux message, une partie d'échecs.
La partie utilisée dans le roman existe réellement,
E.Z. Adams (2200) - Carlos Torre (2450)
[C62] défense Philidor.
City Championship - New Orleans, LA, 1920

http://www.lifemasteraj.com/old_af-dl/adatorrpg0.html
Partie qu'a récemment magnifiquement utilisé J-F Jolly, un des meilleurs joueurs bretons, pour expliquer aux jeunes espoirs du Morbihan, l'attaque sur le roi.


Aux Blancs de jouer, 18ème coup.
"Dans cette position, les noirs n'ont pas l'air d'avoir de souci quant à la sécurité de leur roi mais en regardant de plus près, on remarque qu'ils ont des problèmes sur la 8ème rangée avec la pression des deux tours sur la colonne e ... Cette faiblesse de la 8ème rangée et le fait que la tour et la dame doivent rester protéger la tour e8 est le point d'orgue de toute la combinaison blanche : 1.Dg4! Db5 2.Dc4!! Dd7 3.Dc7! Db5 (on comprend qu'il faut dévier la dame de la diagonale a4-e8 pour gagner) 4.a4!! Dxa4 5.Te4!! Db5 6.Dxb7! 1-
0" Magnifique.
Tiens donc, voilà ce que certains peuvent penser des joueurs d'échecs, page 43 : "Déjà à la base, je ne pense pas que ces types soient bien normaux pour pouvoir passer des heures devant une planche en bois ..."

182- La langoureuse - Etienne Ethaire


La langoureuse
Etienne Ethaire
Ed. Le somnambule équivoque, 2003
Premier roman d'Etienne Ethaire, "un thriller psychologique au style incisif, concis et rigoureux", a reçu un prix d'aide à l'édition du Fonds National de la Littérature. En 4ème de couverture, "Pour le lecteur curieux d'en savoir plus sur l'énigmatique écrivain, (...) : l'amour du cinéma (Juliette Binoche), du jeu d'échecs (les fianchettos) et des voyages (y compris intérieurs).
Histoire dure et sombre d'une fille qui se détruit dans sa famille et dans la société, drame de l'anorexie en particulier.
Du jeu d'échecs pour quelques pages, un cadeau page 48 à son petit frère Tarriel : "Mon frère assimila les rudiments du jeu d'échecs d'une manière fulgurante (...) Il mit à peine quelques mois avant de me mater ..." Et page 55, à 17 ans, il est grand-maître ès échecs, "un colosse aux pieds d'argile, un univers en soi, son labyrinthe, son refuge...", page 105 encore...
http://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89tienne_%C3%89thaire
http://www.lesomnambule.be/

181- Histoires d'ombres - Hervé Jaouen


Histoire d'ombres
Hervé Jaouen
né en 1946 à Quimper, un métier d'abord dans la banque, devient quelques années plus tard un écrivain à part entière, auteur à succès, des polars et plusieurs prix, mais aussi des livres sur l'Irlande, des livres jeunesse, des scénarios de films... Il a droit aussi à un article sur Wikipedia
http://fr.wikipedia.org/wiki/Herv%C3%A9_Jaouen
"Nina, celle par qui le malheur arrive. Le héros était là pour se détendre enfin, au plaisir de la pêche à l'ombre... et voilà qu'arrive cette fille... qui rêve de tuer son vieux mari...
En fait, le jeu d'échecs est peu cité, passons sur la découverte du mot page 29 aux côtés du tennis, du Scrabble, du golf et même du touche-pipi ! Page 91, "le père et le fils Legras au salon. Ils jouaient aux échecs sur l'échiquier d'un ordinateur, un Sensory Challenger super 9... le héros propose alors une partie au fils qui se croit si fort et le ridiculise sur trois pages...
Page 114 : "Nina, la dame noire..."
Des connaissances sur la pêche au lancer au bord du Doubs, sur ce poisson qu'est l'ombre "un poisson de plus de quarante centimètres..."
Roman Histoire d'ombres sorti en 1986.
Ed. Denoël Le livre de poche n°6942 1991 pour la version présentée

Adapté pour France 2 : http://www.hervejaouen.fr/film.php

HISTOIRE D'OMBRES

Réalisateur : Denys Granier-Deferre
Sortie : 1988
Durée : 90 mn
Production : Hamster pour "Haute Tension" de France 2

180- Un saint homme in Petites trahisons et grands malentendus - Jaouen


Un saint homme
in Petites trahisons et grands malentendus

Hervé Jaouen


Ed. Diabase Littérature, 2009

4ème de couverture. Deux assureurs irlandais, pêcheurs à la ligne, amis mais compétiteurs jusqu'à la jalousie, un jeune écrivain confronté au faux pardon d'un ancien professeur envieux, un auteur célèbre face à la vacuité des dîners en ville, un millitaire en retraite manipulateur, deux soeurs en famille et en religion qui règlent leurs comptes au moment des derniers sacrements ... autant de portraits et de situations que Hervé Jaouen met en scène avec l'acuité d'un observateur sans concession. Une suite d'histoires noires, cruelles et drôles de la comédie humaine. Couverture : peinture de Georges Bahgory.

Six nouvelles et nos zones d'ombres qui créent les petites trahisons et les grands malentendus. Histoires qui respirent des réalités dans la minutie des sentiments et les détails des descriptions.
Hervé Jaouen apprécie la nature, son Irlande certes, aussi les pêcheurs, ainsi déjà dans Histoires d'ombres (
), aussi les chasseurs, mais pas ceux qui lâchent les faisans pour en faire un carnage. Hervé Jaouen typent ses personnages, l'écrivain, la bonne soeur, le professeur ... un livre captivant !

La nouvelle Un saint homme, 30 pages, utilise le jeu d'échecs. Le nouveau directeur de la banque tente ainsi d'amadouer le préfet en retraite et son compte-chèques bien rempli. Les lundis, ils jouent dans la splendide villa Ker an Aod et ainsi il progresse dans le jeu d'échecs semaine après semaine.Il fait aussi connaissance de Poupinette (!), la femme du préfet ... Quelques années plus tard, un club d'échecs local fut créé, un évènement ! et les deux partenaires jouèrent ensemble en équipe ... jusqu'à ...

http://eireann561.canalblog.com/archives/2009/03/05/12824157.html

http://www.hervejaouen.fr/

Merci à Jean-Yves Boivin pour l'info ! Un livre à découvrir dans toutes les bonnes librairies ! (16€)
et précision :
Le 7 avril 2009, "Petites trahisons et grands malentendus" a été sélectionné pour le Goncourt de la Nouvelle 2009. Verdict final, le 12 mai.
JYB.

mardi 24 mars 2009

179- Joueurs d'Echecs au Jardin du Luxembourg -


Joueurs d'échecs au jardin du Luxembourg

Robert Laugier, photographe


Avec autorisation de l'auteur, merci !
Et découvrez les différents thèmes noir et blanc
http://pagesperso-orange.fr/robert.laugier/joueurs-echecs/joueurs-echecs-0.html

Magnifique !

178- Echecs - manuel de Christophe Bernard


Echecs
Christophe Bernard

Ed. Mango Jeunesse


Un beau livre spiralé, incorporant un mini jeu d'échecs. La quatrième de couverture informe : Cet ouvrage vous explique le déplacement des pièces et les règles particulières, vous apprend à résoudre des "combinaisons" par thème, puis à rechercher des mats. Ensuite, des exercices sont proposés pour apprendre à démarrer correctement une partie d'échecs, à développer un "plan" en milieu de jeu, et à étudier les fins de partie. Enfin, on retrouve un florilège de parties miniatures célèbres (...) Une méthode en images, entièrement nouvelle - l'ouvrage date de 2001 -, à la portée de tous.

La manipulation du livre est effectivement agréable, bien qu'il faut quelque précaution pour ne pas abimer les feuilles de la spirale... Un coût à l'origine un peu cher pour le commun des joueurs (environ 37 euros bien que la valeur du contenu est là), c'est pourquoi peut-être un bon nombre d'exemplaires peuvent se retrouver aujourd'hui - 2009 - en solderie à des prix sacrifiés.


le site du Maitre International et ancien champion de France Christophe Bernard http://christophebernard.net/echecs/

Christophe Bernard et l'Echiquier Lempdais http://echiquierlempdais.hautetfort.com/archive/2006/04/19/m.html

lundi 23 mars 2009

177- Les joueurs d'échecs de Frances P Keyes


Les joueurs d'échecs

Frances Parkinson Keyes

Presses de la Cité, 1961

Voilà un roman qui occupe son monde, 476 pages de petits caractères, cependant passionnant, relatant la vie de Paul Morphy, le champion d'échecs américain. Les paysages de la Louisiane sont splendides et l'histoire américaine des plantations à la sécession est relatée dans les détails. Du jeu d'échecs bien entendu , la montée en puissance de Paul Morphy et ses rencontres contre d'autres champions, jusqu'au célèbre Café de la Régence à Paris. Et une histoire d'amour bien entendu, d'amour contrarié, Paul amoureux de la belle Yankee Charmian.

4ème de couverture : Frances Parkinson Keyes retrouve, pour les Joueurs d'échecs, un de ses cadres favoris, celui de la Nouvelle-Orléans. Son héros, Paul Morphy, est le petit-fils, à la fois d'un hidalgo et d'un marchand d'esclaves, tous deux liés par leur commun amour pour les échecs. Leur petit-fils sera encore plus doué qu'aucun d'eux, mais heureux au jeu, il sera malheureux en amour. Il ira oublier ses déceptions amoureuses en Europe, au temps de la guerre de Sécession et il sera, dans le Paris brillant et agité du Second Empire, le plus actif et le plus utile des agents secrets des Confédérés.
Mais cette grande fresque historique n'évoque pas seulement Paul Morphy ; autour de ce héros principal, Frances Parkinson Keyes a planté les figures légendaires des plus grands des Confédérés, Beauregard, Benjamin et Slidell.
Aprés l'épopée d'Atlanta avec Autant en Emporte le Vent, voici l'épopée de la Nouvelle-Orléans avec les joueurs d'Echecs.

Le sommaire :
Première partie : La Reine est la pièce la plus forte de l'échiquier : Janvier 1825 - Février 1829
Deuxième partie : Le Cavalier avance : 1847 - 1857
Troisième partie : Le Roi des jeux : 1857 - 1859
Quatrième partie : Le Gambit n'est pas bon : 1861 - 1862
Cinquième partie : Le problème est différent quand on ne manie plus des pions mais des hommes. : 1862 - 1865
Epilogue : Shâh-Mât - 10 juillet 1884.

Pour servir d'introduction à bon nombre de chapitres, sont insérés des petits bijoux glanés de ci de là, ainsi citons, parmi tous :

page 39, le contrat de mariage le 20 février 1829 entre A. M. Morphy et L.Le Carpentier, parents quelques années plus tard de Paul. Parmi les biens de l'époux, une somme de 10 000 piastres, des parcelles de terrain et divers esclaves, dons Louison, mulâtresse, 45 ans, blanchisseuse, estimée 500 piastres (...)
page 72, la morale des échecs écrit par Benjamin Franklin 1779 : en jouant aux échecs, dit-il, nous aprrendrons : 1° La prévoyance (...), 2° La circonspection (...), 2° La prudence et la réflexion, tout cela relaté par The Chess Reader.
Page 246 : discours de Paul Morphy relaté par Philip W. Sergeant in Morphys's Gleanings, Un mot à présent sur le jeu même. Les échecs n'ont jamais été et ne pourront jamais être autre chose qu'une récréation. On ne devrait pas s'y livrer au détriment d'autres et plus sérieuses vocation, ils ne devraient pas absorber exclusivement les pensées de ceux qui apportent un culte à leur autel (...)
Page 381 : Le Rubaiyat d'Omar Kheyyam d'après la traduction d'Edward Fitzgerald,
Tout n'est qu'un échiquier de nuits et de jours
Où le Destin joue en prenant les hommes pour pièces.
Par-ci, par-là, déplaçant les uns et les autres, il joue,
Et l'une après l'autre les pièces retournent dans le coffret.
Page 463 : The Daily Picayune, vendredi matin, 11 juillet 1884
(...) Anderssen, comme Morphy, était remarquable pour la beauté de ses combinaisons ; il fut battu par Morphy en son jeune temps - Morphy qui ne jit jamais que gratter la surface de sa merveilleuse aptitude. Sans l'ombre d'un doute, Morphy fut le plus extraordinaire joueur d'échecs qui ait jamais vécu (....)

http://en.wikipedia.org/wiki/Frances_Parkinson_Keyes

http://fr.wikipedia.org/wiki/Paul_Morphy, à la lecture de sa biographie, nous découvrons que le roman de Frances Parkinson Keyes a su transcrire les matchs de Paul Morphy contre les meilleurs joueurs de l'époque (liens présents sous wikipedia des parties jouées contre Paulsen, Brunswick, Anderssen), a transcris sans doute assez fidélement le fil de l'histoire, mais a sans doute ajouté des éléments amoureux et modifié sans doute les idées de Paul Morphy au sujet de la guerre de Sécession...

samedi 21 mars 2009

176- La seconde pièce d'échecs - Laurent Georget

La seconde pièce d'échecs


La scène représente le bureau d'un commisaire de police. On y voit un détective, le commissaire assis à une table sur laquelle est posé un jeu d'échecs et un homme de l'autre côté.


LE COMMISSAIRE : Bon, reprenons, voulez-vous ? Vous affirmez donc avoir été tué. Pouvez- vous décrire votre agresseur ?

L'HOMME : Euh oui. Alors, il était grand, brun aux yeux marrons.

LE COMMISSAIRE : Ah, un peu comme vous en fait.

L'HOMME : Oui, voilà.

LE COMMISSAIRE : Autre détail ?

L'HOMME : Oui, avant de me tuer, il m'a soumis ce terrible problème. (il met les pièces en place)

LE COMMISSAIRE et LE DETECTIVE : (ensemble) Quel terrible problème !

L'HOMME : Comme vous le voyez ! Il m'a promis la vie sauve si jamais je lui fournissais la réponse mais j'étais tellement obsédé par l'idée de la trouver que j'en ai perdu tous mes moyens et que j'ai dû donner ma langue au chat. Cependant, à ma demande, il m'a donné la solution du problème.

LE DETECTIVE : (intéressé) Pourquoi vouliez-vous la connaître ?

L'HOMME : Pour ne pas avoir l'air de mourir idiot, bien sûr.

Le commissaire regarde d'un air interrogateur le détective qui lui hoche la tête d'un air approbateur.

LE DETECTIVE : C'est une réponse acceptable.

L'HOMME : Il m'a donc donné cette réponse très basique en somme (il montre) , j'en garde un souvenir acide... enfin je veux dire...

LE COMMISSAIRE : Nous avons compris, ce sera tout pour aujourd'hui, feu cher monsieur. Nous allons mener l'enquête, nous tiendrons évidemment au courant votre famille.

L'HOMME : Merci. (il s'en va)

LE COMMISSAIRE : Que pensez-vous de cela, cher ami ?

LE DETECTIVE : Nous ferions mieux d'inspecter la scène du crime notre défunt plaignant nous a indiqué.

LE COMMISSAIRE : D'accord. (ils passent côté jardin)

LE DETECTIVE : Comme c'est étrange, un couteau propre, des taches de sang partout et des pièces d'échecs qui trainent mais pas trace du cadavre du mort que nous avons vu tantôt. L'un de vos hommes l'a-til déplacé ?

LE COMMISSAIRE : Dieu me savonne, non ! Ce matin, une équipe qui faisait sa patrouille est tombé en arrêt devant cette cour où trainait le cadavre. Nous sommes tous accouru et l'affaire paraissant ténébreuse, nous avons fait appel à vos légendaires compétences et...

LE DETECTIVE : Un instant, comment saviez-vous que l'affaire était ténébreuse ?

LE COMMISSAIRE : Eh bien, il était six heures du matin et dans cette cour le soleil ne pénètre correctement qu'aux alentours de midi lorsque le soleil est au zénith à cause des quatre barres HLM qui nous entourent.

LE DETECTIVE : Une configuration astronomico-géographique propice aux meurtres, je commence à comprendre. Poursuivez, je vous en prie.

LE COMMISSAIRE : Donc, j'ai laissé un agent en faction, le reste a regagné le commissariat et moi, je suis allé vous trouver.

LE DETECTIVE : Un policier en faction, dites-vous ? Où cela ?

LE COMMISSAIRE : Tiens, oui. Où est-il ?

LE DETECTIVE : Le mystère s'épaissit. Tiens, un soulier, là-bas. (ils le ramassent et l'examinent)

LE COMMISSAIRE : Il fait partie de l'uniforme du commissariat. Il est formellement interdit de quitter son soulier, pourtant, même losque l'on est assis devant son bureau. Que faisons- nous, alors ? Il a dû arriver malheur au pauvre homme.

LE DETECTIVE : Je suggère que l'on regarde sous cette couverture. (ils regardent)

LE COMMISSAIRE : Malheureusement, ce n'est que le cadavre du policier disparu. Voyons ailleurs. (Il laissse retomber la couverture)

LE DETECTIVE : (une lueur de génie dans les yeux) Allons arrêter le prétendu mort.

Ils sortent, on les entend faire le tour puis ils rentrent côté cour encadrant le prétendu mort.

LE DETECTIVE : Allons, avouez tout.

L'HOMME : Eh bien, oui, j'ai menti, je ne suis pas mort. C'était une mise en scène.

LE DETECTIVE : A quel fin ?

L'HOMME : J'ai souscrit il y a quelques années une assurance qui me arantissait contre la perte définitive de balles du pistolet que je venais alors d'acheter.

LE DETECTIVE : Pour frauder, vous auriez pu tirer en l'air.

L'HOMME : On aurait pu dire que je l'avais dissimulé, ce qui d'un certain point de vue aurait été vrai tandis que si l'on me tuait avec une arme, le vol était avéré.

LE DETECTIVE : Cela aurait marché si vous n'aviez pas déposé un couteau mais bien votre pistolet dans la scène de crime.

L'HOMME : Je me suis rendu compte de cette méprise, aussi lorsque j'ai vu qu'un policier restait en faction devant la scène de crime, j'ai vu que là était ma chance. J'ai cessé de faire le mort, je me suis levé et j'ai entrepris d'escalader la barre HLM où j'habite.

LE COMMISSAIRE : (incrédule) Sous les yeux du policier ?

L'HOMME : Il ne me regardait pas moi, me sachant mort, mais l'unique accès menant à la cour où je faisais semblant de reposer.

LE COMMISSAIRE : Cet homme était drôlement malin. Il va falloir penser à le faire commissaire à titre posthume.

L'HOMME : Je suis donc rentré chez moi par la fenêtre, j'ai pris le pistolet, je suis redescendu par le même chemin, j'ai tué le policier, je l'ai trainé àtravers la cour jusqu'à la couverture, dispersant ainsi du sang qui rendait l'affaire plus crédible et enfin, j'ai enlevé la chausssure droite du véritable mort pour lui donner une allure de cadavre plus naturelle et enfin j'ai dispersé quelques pièces d'échecs et je suis allé vous trouver. Je vous ai raconté cette histoire de problème d'échecs pour vous faire croire à un crime de maniaque des échecs revenu sur le lieu de son crime et assassinant un policier. Je serais curieux de savoir comment vous m'avez démasqué.

LE DETECTIVE : Je raconterais tout cela au procès. Allons, emmenez-le, cher ami.

Le policier l'emmène puis revient.

LE COMMISSAIRE : A moi, vous pouvez bien le dire tout de même.

LE DETECTIVE : Soit. Je me suis souvenu à la scène de crime de la déclaration qu'il nous avait faite à propos du problème d'échecs. Vous savez, cette histoire de solution basique et de souvenir acide.

LE COMMISSAIRE : Oui, oui, je m'en souviens. Et alors ?

LE DETECTIVE : Alors, je suis allé consulter l'expert chimiste du laboratoire de police et j'ai eu la confirmation de ce que je pensais. L'homme nous avait fait une fausse déclaration, il nous avait fait une fausse déclaration et de là, j'en ai déduit tout ce que vous avez entendu.

LE COMMISSAIRE : Prodigieux. Mais quel est le lien entre sa déclaration et la chimie.

LE DETECTIVE : Eh bien, une solution, fût-elle celle d'un problème d'échecs ne peut pas être à la fois basique et acide. C'est chimiquement impossible. En fait, notre homme a voulu dire « j'en garde un souvenir amer » mais sa langue a fourché et il s'est trahi.

LE COMMISSAIRE : Véritablement prodigieux. Mais en fait cette pièce de théâtre dont nous sommes les personnages n'a aucun lien avec les échecs.

LE DETECTIVE : Eh non. Mais faisons semblant.